Des récits qui prennent aux tripes….
Quand j’ai commencé à réfléchir à ma création d’entreprise, je souhaitais ardemment écrire pour les autres, peu importe le style d’écrits. Je m’étais suffisamment exercée dans l’écriture des différents types de textes par la formation d’écrivain public auprès du CNFDI (Centre de formation privé à distance). Une formation pointue et ardue que j’ai suivie à distance, pendant presque un an. J’ai remis 20 fois sur le métier, voire plus, concernant les exercices d’écriture… Apprendre à écrire des textes personnels (biographie,…) était pour moi une nouveauté. Et surtout, je ne m’attendais pas à ce que mes futurs clients clients pourraient me confier… Ce fut le cas !
À l’automne 2023, j’ai été contactée par une dame qui souhaitait écrire un récit sur sa vie. Au téléphone, j’ai vite saisi que son projet avait une vocation thérapeutique, et bien sûr de transmission à sa famille. Nous avons convenu d’un premier RDV, près de chez moi dans une crêperie au coin de ma rue (il y a suffisamment d’intimité en début d’après-midi pour pouvoir se confier sereinement). Un Beau soleil d’arrière-saison nous a permis de nous installer en terrasse (encore mieux !). Ma cliente, une dame d’environ 70 ans, simple (sans être péjorative) a été immédiatement très à l’aise pour commencer à me conter son histoire, et ses motivations personnelles. Elle a deux filles qui habitent près de chez elle, dans la même commune et qui ne lui parlent presque plus, ainsi que ses petits-enfants. Au fil des ans, les liens se sont distendus, et avec son récit elle espère que sa famille se rapproche et comprenne certaines de ses décisions. En effet, son histoire est extrêmement douloureuse et fait froid dans le dos ! Non, ce n’est pas de la fiction, une histoire qui peut arriver avec des gens « lambdas », dont on ne soupçonnerait aucunement de vivre une intimité aussi dramatique.
Elle me fit part que son époux partait assez souvent en missions à l’étranger, et que là, c’ était un soulagement pour elle, et ses enfants le ressentaient également. Quand il revenait et restait en famille, c’était un véritable tyran, la critiquant, la rabaissant sans cesse quoiqu’elle fasse ! (je commençais aussi à me sentir envahie d’une sensation de malaise, appréhendant la suite). Je ne suis pas psychologue, ni psychiatre, je n’ai aucune compétence en ce domaine, mais mon intuition me suggérait que son époux avait un profil spécial. Il pouvait être également odieux quand ils recevaient des amis, ne leur parlant pas ou alors se comporter de manière très désagréable en paroles, et dans les actes. Son but était d’isoler au maximum son épouse, lui laissant croire que c’était elle la personne faible, malade, à devoir se soigner... Depuis, elle a bien sûr divorcé, s’est remariée avec un homme très compréhensif, aimant, patient, qui connaît son histoire dramatique.
Pour moi, cela a aussi été compliqué de ne pas me trop me laisser envahir par mes émotions, rester professionnelle, et m’enquérir de savoir (habilement) relancer un peu la discussion. En fait, c’est sur le conseil de son thérapeute qu’elle a justement souhaité raconter son histoire, pour se dégager un peu du poids de celle-ci. Nous nous sommes rencontrées à plusieurs reprises. L’émotion était palpable à chaque fois. Elle m’a remerciée pour notre collaboration, son thérapeute la trouvait plus sereine.
Oui, cette histoire m’a bien évidemment bouleversée, et j’ai pris conscience de mon rôle, de l’importance de l’habileté à manier les entretiens dans ce contexte et de l’immense confiance que me font certains clients en me narrant un pan douloureux de leur vie.
(je n’ai pas tout raconté et j’ai édulcoré certains faits).